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Les copies d’examen manuscrites, comme les annotations des examinateurs, constituent des données à caractère personnel


12 mars 2018



Cour de Justice de l’Union Européenne, 20 décembre 2017, aff. C-434/16, Peter Nowak contre Data Protection Commissioner :

 

Saisie d’une question préjudicielle, la CJUE a affirmé que « les réponses écrites fournies par un candidat lors d’un examen professionnel et les éventuelles annotations de l’examinateur relatives à ces réponses constituent des données à caractère personnel, au sens de cette disposition » (CJUE, 20 décembre 2017, aff. C-434/16, Peter Nowak contre Data Protection Commissioner).

 

En effet, l’article 2 de la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, repris par l’article 2 de la loi française du 6 janvier 1978, définit les données à caractère personnel comme « toute information concernant une personne physique identifiée ou identifiable (personne concernée); est réputée identifiable une personne qui peut être identifiée, directement ou indirectement, notamment par référence à un numéro d’identification ou à un ou plusieurs éléments spécifiques, propres à son identité physique, physiologique, psychique, économique, culturelle ou sociale ».

 

Or, la CJUE relève les éléments suivants :

 

  • « un candidat à un examen professionnel est une personne physique qui peut être identifiée soit directement, à partir de son nom, soit indirectement, à partir d’un numéro d’identification, lesquels sont apposés sur la copie d’examen ou le feuillet de couverture de cette copie ». A cet égard, il est indifférent que l’examinateur n’ait pas eu ses informations à sa disposition au moment de la correction des copies dès lors que l’institution organisant l’examen pouvait identifier les candidats à partir de leurs copies.

 

  • La protection des données à caractère personnel « n’est pas restreinte aux informations sensibles ou d’ordre privé, mais englobe potentiellement toute sorte d’informations, tant objectives que subjectives sous forme d’avis ou d’appréciations, à condition que celles-ci « concernent  la personne en cause ». Il en est ainsi « lorsque, en raison de son contenu, sa finalité ou son effet, l’information est liée à une personne déterminée ».

 

  • Les réponses écrites fournies par un candidat à un examen professionnel présentent un caractère personnel dès lors qu’elles concernent ce candidat en raison de leur contenu, de leur finalité et de leur effet.

 

D’une part, « le contenu de ces réponses reflète le niveau de connaissance et de compétence du candidat dans un domaine donné ainsi que, le cas échéant, ses processus de réflexion, son jugement et son esprit critique.

 

En cas d’examen rédigé à la main, les réponses contiennent, en outre, des informations sur son écriture ».

 

D’autre part, « la collecte desdites réponses a pour finalité d’évaluer les capacités professionnelles du candidat et son aptitude à exercer le métier en cause ».

 

Enfin, « l’utilisation de ces informations, qui se traduit, notamment, par le succès ou l’échec du candidat à l’examen concerné, est susceptible d’avoir un effet sur les droits et intérêts de celui-ci, en ce qu’elle peut déterminer ou influencer, par exemple, ses chances d’accéder à la profession ou à l’emploi souhaités ».

 

Par ailleurs, la qualification de données à caractère personnel s’applique également aux annotations portées par les examinateurs, puisque celles-ci reflètent « l’avis ou l’appréciation de l’examinateur sur les performances individuelles du candidat lors de l’examen, et notamment sur ses connaissances et ses compétences dans le domaine concerné ».

 

Elles constituent donc des informations concernant le candidat à l’examen, même si elles concernent également l’examinateur qui les a portées (une donnée pouvant présenter un caractère personnel à l’égard de plusieurs personnes).

 

 

  Annabel QUIN,
Maître de conférences à l’Université de Bretagne-Sud
Ancienne avocat au Barreau de Paris

 Mise en ligne: 12/03/2018

 





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