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Décision du Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI ordonnant le transfert d’un nom de domaine


22 janvier 2018



Principes directeurs pour un règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (Principes UDRP) :

 

 

Une société a enregistré, à titre de nom de domaine, la marque d’une autre société avec l’ajout du suffixe « sas ».

 

Il s’agissait à l’évidence d’une tentative d’hameçonnage (ou phishing) visant à faire croire aux internautes qu’ils contractaient avec le titulaire de la marque.

 

Ce dernier a engagé une procédure administrative devant le Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI et a obtenu que le nom de domaine lui soit transféré (décision du 27 juillet 2017 ; Transfert d’un nom de domaine utilisé pour du hameçonnage, Légalis, 31 août 2017 ).

 

Pour ce faire, la Commission administrative saisie du litige a vérifié la réunion des trois conditions posées par le paragraphe 4(a) des Principes UDRP (Principes directeurs pour un règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine), à savoir :

 

  • que le nom de domaine soit identique à, ou présente une similitude prouvant prêter à confusion avec une marque commerciale ou une marque de service dans laquelle le plaignant a des droits.

 

En l’espèce, la Commission administrative a estimé que cette différence ne conférait pas au nom de domaine litigieux un autre sens, pas plus qu’elle ne permettait de le distinguer de la marque du requérant. Au contraire, elle a considéré que le choix de ce nom de domaine pouvait prêter à confusion dans la mesure où les internautes pouvaient penser qu’il renvoyait au requérant, titulaire de la marque du même nom.

 

  • que le défendeur n’ait aucun droit ou intérêt légitime au regard du nom de domaine.

 

En l’espèce, le défendeur n’avait pas été autorisé à utiliser la marque ou à procéder à l’enregistrement d’un nom de domaine incluant la marque.

 

Il n’était d’ailleurs même pas intervenu au cours de la procédure administrative, ne donnant ainsi aucun élément permettant de penser qu’il faisait un usage légitime et non commercial du nom de domaine litigieux.

 

C’est même l’inverse qui ressortait du dossier où il apparaissait que le défendeur faisait un usage du nom de domaine litigieux à des fins frauduleuses.

 

  • que le nom de domaine ait été enregistré, d’une part, et utilisé, d’autre part, de mauvaise foi. En l’espèce, la Commission administrative estime que le choix du nom de domaine n’a pas été le fruit d’une simple coïncidence, qu’il avait pour « but manifeste de passer des commandes auprès de tiers et de se faire livrer des biens pour des montants importants, en se faisant passer pour le » titulaire de la marque. En tout état de cause, elle rappelle que la simple immobilisation d’un nom de domaine, sans raison, peut être constitutive d’un usage de mauvaise foi, dès lors qu’aucun site internet actif n’y correspond. Par ailleurs, s’agissant de la preuve d’un usage de mauvaise foi, elle estime qu’elle ressort de ce que l’usage de bonne foi n’apparaît pas plausible. Elle en conclut « qu’en détenant et utilisant le nom de domaine litigieux à des fins d’hameçonnage et en ne se manifestant pas dans la présente procédure administrative, le défendeur avait procédé à une utilisation de mauvaise foi du nom de domaine litigieux.

 

Cette décision n’exclut pas l’exercice de procédures judiciaires, dont la décision relève que trois sont en cours (dépôts de plaintes pénales). Mais les procédures en cours n’excluent pas l’adoption d’une décision, comme le montre l’espèce rapportée, à la discrétion de la Commission administrative.

 

 

Annabel QUIN,
Maître de conférences à l’Université de Bretagne-Sud
Ancienne avocat au Barreau de Paris

 Mise en ligne: 22/01/2018





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