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Travaux à la charge du constructeur ou du maître d’ouvrage ? Cass. civ. 3ème, 13 novembre 2014, n° 13-18937 et 13-24217


17 février 2015



Cass. civ. 3ème, 13 novembre 2014, n° 13-18937 et 13-24217 ; -FS-P+B ECLI:FR:CCASS:2014:C301325, « M. Y c/ Consorts X. », Cassation de C.A. Rennes, 4 juillet 2013.

Voir le commentaire de cet arrêt à la Gazette du Palais édition spéciale immobilier n° 1 2015

Résumé A défaut d’avoir été précisément décrits et chiffrés dans le contrat et d’une mention manuscrite du maître de l’ouvrage dans la notice descriptive déclarant qu’il en accepte le coût et la charge, des travaux ne peuvent être considérés comme étant restés à la charge de ce dernier, même s’il l’a expressément déclaré dans une attestation extérieure au contrat. Dans un autre registre, l’arrêt rappelle encore que le CCMI est un contrat à exécution successive et non instantanée.

Sur le double fondement des articles L. 231-2 et R. 231-4 du CCH, les travaux dont le maître de l’ouvrage entend se réserver l’exécution dans le cadre de l’exécution d’un contrat de construction de maison individuelle doivent être précisément décrits et chiffrés dans le contrat et la notice descriptive annexée à ce contrat doit comporter une mention manuscrite de ce dernier précisant qu’il en accepte le coût et la charge (Cass. civ. 3ème, 29 mai 2013, n° 12-10.111, Gaz. Pal. 8-10 septembre 2013, p. 40, note J.-Ph. Tricoire ; Cass. civ. 3ème, 24 octobre 2012, n° 11-18.164, Gaz. Pal. 2 mars 2013, p. 40, note J.-Ph. Tricoire).

Une attestation extérieure au contrat par laquelle le maître de l’ouvrage déclare se réserver certains travaux ne saurait compenser le défaut de chiffrage et de description de ces travaux dans le contrat ni se substituer à la mention que le maître de l’ouvrage doit poser de sa main dans la notice descriptive.

Dès lors, ces travaux non décrits et chiffrés dans le contrat sont à la charge du constructeur qui doit les réaliser pour le prix forfaitaire, global et définitif prévu au contrat. Ceci alors même que ce prix initial ne tenait pas compte de ces travaux !

La solution, qui peut sembler sévère pour les constructeurs, confirme que l’obligation de description et de chiffrage dans le contrat des travaux laissés à la charge du maître de l’ouvrage et l’exigence d’une mention manuscrite de ce dernier dans la notice descriptive sont des exigences de fond et non de simples règles de preuve susceptibles d’être complétées, par d’autres modes de preuve – comme une attestation extérieure.

La position retenue par la troisième Chambre civile de la Cour de cassation par le caractère d’ordre public des dispositions des articles L. 231-1 et suivants du CCH. Surtout, elle s’inscrit exactement dans le mouvement de protection des intérêts du maître de l’ouvrage initié par les rédacteurs de la loi n° 90-1129 du 19 décembre 1990.

Sur un tout autre plan, l’arrêt rappelle également que le CCMI est un contrat à exécution successive et que, sauf circonstances particulières, rien ne saurait justifier que la période de saine exécution du contrat de construction soit remise en cause. A fortiori, lorsque le maître de l’ouvrage déclare souhaiter conserver la maison dans l’état d’avancement où elle se trouve. En pareille hypothèse, l’anéantissement du contrat ne peut évidemment valoir que pour l’avenir et non avoir un effet rétroactif.

 

Jean-Philippe TRICOIRE
Université de Franche-Comté
Directeur du master droit des affaires et du patrimoine
Directeur scientifique du pôle immobilier ALTA-JURIS

 

Mise en ligne : 17/02/2015

 





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