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CEDH : condamnation de la France pour le fichier STIC (Système de traitement des infractions constatées)


5 février 2015



CEDH : condamnation de la France pour le fichier STIC, incompatible avec une société démocratique. Le STIC (Système de traitement des infractions constatées) est (était ?) un fichier de police, créé en 2001, pour regrouper les informations tirées des procédures judiciaires policières. Les données (identité, filiation, situation familiale, adresse, profession, photo, objet de l’enquête) sont conservées pendant 20 ans pour les auteurs et 15 ans pour les victimes. Le nombre de personnes fichées est considérable. En décembre 2008, il recensait la moitié de la population française…

Or, la CNIL a constaté qu’il était truffé d’erreurs et que « seules 17 % des fiches de mis en cause étaient exactes : les suites judiciaires (non-lieu, acquittement, relaxe ou condamnation) n’étaient tout simplement pas transmises par les tribunaux. Avec des conséquences dramatiques, puisque le STIC est utilisé à des fins de contrôle pour certains emplois dits « sensibles ». Il est aussi l’un des fichiers qui seront consultés pour vérifier la bonne moralité des jurés populaires introduits dans les tribunaux correctionnels par la loi du 10 août 2011 »[1].

 

De plus, la confidentialité de ces informations est très relative : « les policiers ont consulté 11 millions de fois le STIC pour la seule année 2012 (…). Il faut y ajouter les douanes, les magistrats, certains services de police étrangers et surtout les personnels chargés des enquêtes administratives : « Un million de personnes ont besoin d’un agrément pour travailler, explique la CNIL. Il suffit qu’ils soient fichés au STIC pour ne pas obtenir leur emploi. » ».[2]

En l’espèce, le requérant, qui avait bénéficié d’un non-lieu, n’avait pas pu faire supprimer les indications le concernant sur ce fichier. La CEDH a estimé, dans un arrêt rendu le 18 septembre 2014, que la conservation des données dans ce fichier « s’analyse en une atteinte disproportionnée au droit du requérant au respect de sa vie privée et ne peut passer pour nécessaire dans une société démocratique »[3].

 

[1] L.Borredon, Le STIC, le mauvais exemple d’un fichier fourre-tout, http://abonnes.lemonde.fr/societe/article/2011/09/12/le-stic-le-mauvais-exemple-d-un-fichier-fourre-tout_1570988_3224.html

[2] F.Johannès, Fichier de police STIC : la Cour européenne des droits de l’homme condamne la France, http://abonnes.lemonde.fr/societe/article/2014/09/19/fichier-de-police-stic-la-cour-europeenne-des-droits-de-l-homme-condamne-la-france_4490547_3224.html

[3] http://hudoc.echr.coe.int/sites/fra/Pages/search.aspx#{« fulltext »:[« brunet »], »languageisocode »:[« FRA »], »documentcollectionid2″:[« JUDGMENTS »], »itemid »:[« 001-146389 »]}

 

 

 

 

Annabel QUIN
Maître de conférences à l’Université de Bretagne-Sud
Ancienne avocate au Barreau de Paris

Mise en ligne : 05/02/2015

 





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