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SkypeOut est un service de communications électroniques au sens de la directive-cadre du 7 mars 2002


15 juillet 2019
Par Annabel QUIN
Maître de conférences à l’Université de Bretagne-Sud
Ancienne avocat au Barreau de Paris



Arrêt rendu le 5 juin 2019 par la Cour de Justice de l’Union Européenne 

SkypeOut est une fonctionnalité ajoutée au logiciel de l’éditeur Skype Communications, qui permet à son utilisateur de passer des appels téléphoniques depuis un terminal vers une ligne de téléphone fixe ou mobile en utilisant le protocole IP.

Il s’agit donc d’un service de VOIP (Voice over Internet Protocol), en vertu duquel la voix n’est plus acheminée sous le protocole RTC (utilisés dans les réseaux téléphoniques traditionnels), mais grâce au protocole IP, comme n’importe quelle autre donnée informatique (2BConnect, VOIP et TOIP : plus qu’une lettre de différence, nov. 2018).

Le litige, qui a donné lieu à un arrêt rendu par la CJUE le 5 juin 2019, portait sur le point de savoir si SkypeOut pouvait être qualifié de service de communication électronique au sens de la directive-cadre 2002/21/CE du 7 mars 2002.

On se souvient que ce texte qualifie comme tel « le service fourni normalement contre rémunération qui consiste entièrement ou principalement en la transmission de signaux sur des réseaux de communications électroniques ».

Concrètement, le service VOIP implique deux services de communications électroniques distincts : : le premier achemine les signaux vocaux de l’utilisateur appelant jusqu’à la passerelle d’interconnexion (Gateway) entre internet et le réseau téléphonique (RTPC pour le réseau belge) et relève de la responsabilité du FAI de l’utilisateur appelant ; le second achemine les signaux sur le RTPC jusqu’à la terminaison fixe ou mobile et relève de la responsabilité conjointe des fournisseurs de services de télécommunications des personnes appelées et de Skype Communications, en vertu des contrats les liant.

Cependant, même si les fournisseurs de services de télécommunications acheminent en partie la transmission des signaux vocaux, ils ne sauraient être tenus responsables de cette transmission à l’égard des utilisateurs de la fonctionnalité SkypeOut, puisqu’ils n’ont pas de relation contractuelle avec lesdits utilisateurs.

C’est Skype Communications qui assume cette responsabilité à leur égard.

La CJUE en déduit que Skype Communications doit être qualifié de service de communication électronique « dès lors que la fourniture dudit service, d’une part, donne lieu à rémunération de l’éditeur et, d’autre part, implique la conclusion par ce dernier d’accords avec les fournisseurs de services de télécommunications dûment autorisés à transmettre et à terminer des appels vers le RTPC ».

Enfin, la Cour précise que la stipulation, par Skype Communications, d’une clause exonératoire de responsabilité dans le contrat la liant aux fournisseurs de services de télécommunications est sans incidence sur la qualification de service de communication électronique.

Cette solution est logique si l’on se rappelle que la qualification litigieuse est née de la volonté de réguler un secteur d’activité et de créer un véritable marché intérieur des communications électroniques.

Cette régulation s’impose à tous les services qui en relèvent, et il n’est pas possible d’y échapper en stipulant une clause exonératoire de responsabilité.

 

 

Mise en ligne:  15/07/2019





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