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Ordonnance du 2 avril 2015 sur le portage salarial : un encadrement attendu


20 avril 2015



Le portage salarial, dont ont à connaître les avocats spécialisés en droit du travail, permet à un prestataire de services d’exercer une mission dans une entreprise sans pour autant perdre les avantages du salariat. Le principe est le suivant : « la société de portage emploie le salarié porté, lui verse un salaire et facture ses clients mais c’est lui qui les démarche » (L.de Comarmond, L’ordonnance qui encadre le portage salarial adoptée en Conseil des ministres, Les Echos, 1er avril 2015). Il est pratiqué par quelques 15 000 salariés, en toute illégalité. C’est pourquoi le gouvernement entend le réglementer.

On se souvient que le Conseil constitutionnel avait exigé qu’une telle réglementation soit adoptée par une loi et qu’une loi avait autorisé le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance (Portage salarial : l’Assemblée autorise le gouvernement à légiférer par ordonnances, L’Express L’entreprise, 23 juillet 2014).

Le nouvel article L.1254-1 du Code du travail, issu de cette ordonnance, donne désormais une définition du portage salarial : ce terme désigne l’ensemble organisé constitué par :

« 1° D’une part, la relation entre une entreprise dénommée “ entreprise de portage salarial ” effectuant une prestation au profit d’une entreprise cliente, qui donne lieu à la conclusion d’un contrat commercial de prestation de portage salarial ;

« 2° D’autre part, le contrat de travail conclu entre l’entreprise de portage salarial et un salarié désigné comme étant le “ salarié porté ”, lequel est rémunéré par cette entreprise

De plus, ladite ordonnance prévoit que le portage est réservé aux personnes qui justifient d’un niveau d’expertise, de qualification et d’autonomie qui leur permettent de rechercher leurs clients et de négocier avec eux leurs prestations (art.1254-2-I). Autrement dit, il s’agit des cadres.

L’ordonnance pose en outre l’exigence d’une rémunération minimale de 2.380 euros mensuels bruts pour un plein temps (75 % du plafond de la sécurité sociale).

Par ailleurs, le contrat de travail devra comporter une « indemnité d’apport d’affaire », fixée à 5% de la rémunération (ou fixée par accord de branche étendu)

Enfin, le recours au portage salarial est exclu pour les opérations suivantes :

  • Pour une opération autre que l’exécution d’une tâche occasionnelle ne relevant pas de son activité normale et permanente ou une prestation ponctuelle nécessitant une expertise dont elle ne dispose pas. (art.1254-3)
  • Pour remplacer un salarié dont le contrat de travail est suspendu à la suite d’un conflit collectif de travail (art.1254-4-I, 1°)
  • Pour effectuer certains travaux particulièrement dangereux figurant sur la liste prévue à l’article L. 4154-1 sauf dérogation prévue au même article.
  • Les services à la personne (art.1254-5)

 

 

 Annabel QUIN
Maître de conférences à l’Université de Bretagne-Sud
Ancienne avocate au Barreau de Paris

Mise en ligne : 20/04/2015

 





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